CROYANCES ATHEES (3)

Visite de Via Veritas

La curiosité s’allume chaque fois qu’on parle de “vérité”

Il s’agit d’un site nouveau monté par des Témoins de Jéhovah repentis, ce qui constitue une originalité. Il propose aux Témoins de Jéhovah un chemin vers l’athéisme, sans négliger la désintoxication des catholiques dans un grand élan d’œcuménisme, comme le montre la citation suivante :

Via Veritas + Skeptic’s Annotated Bible + Plan de lecture biblique [1]+ Le Gros Mensonge de la Bible =Gros problèmes en perspective pour les Romains fondamentalistes.

Il s’agit d’un site “d’évangélisation à rebours” mais la perspective jéhoviste demeure dans l’attitude missionnaire.

de quoi est fait un site athée ?

Il contient le plus souvent des exposés théoriques. De plus en plus de sites athées répercutent

  • l’idée que la Bible est un mensonge dans son ensemble
  • les thèses mythistes, c’est à dire l’opinion que Jésus n’a pas eu d’existence historique, de Prosper Alfaric à Michel Onfray [2].

Celui-ci ajoute des textes spécifiques dénonçant les doctrines et les pratiques des Témoins de Jéhovah.

que valent les références fournies par ces sites ?

Dans un premier temps, tous s’adressent à des chrétiens qui croiraient les 2 énormités suivantes :

  • que la Bible est un livre d’histoire au sens où ce mot s’entend depuis Michelet,
  • qu’elle a été composée d’un seul trait comme le roman de Dan Brown et par un seul auteur.

Par exemple, la plupart d’entre eux sont basées sur une représentation fondamentaliste des croyances de leurs visiteurs adeptes d’une religion chrétienne ou d’une autre. En quelque sorte, ils ne posent de problèmes qu’à un petit public, celui qui les évite soigneusement.

Pour un public cultivé, même croyant, on se rend vite compte qu’ils débitent autant de doctrines que les divers fondamentalismes. Par exemple, sur le Forum Zététique, 2 fils démonétisent les prétendues révélations de ce genre de site :

Les sites athées s’étendent donc sur des contradictions tout à fait illusoires. Outre la Bible dévoilée (présenté sur le site de Via Veritas, avec des conclusions que répudieraient leurs auteurs), on s’étonne que cet ouvrage de base ne soit pas connu : Pierre Bordreuil, Françoise Briquel-Chatonnet , Le Temps de la Bible (possiblement presses du CNRS). Cela leur éviterait de parler “d’anachronisme de la Bible” là où il faut parler de “compilation de 2 sources“, ou de “chronique du temps présent au travers d’un thème choisi dans le passé” (flagrant quand on considère les 2 livres des Rois et les 2 livres des Chroniques dans la version en hébreu, voir de “midrash pesher” qui est un genre littéraire d’actualisation … romanesque si cet anachronisme m’est permis). Demanderait-on des comptes sur sa cohérence dans le suivi des personnages à un recueil qui rassemblerait les contes de l’Humanité, ceux des frêres GRIMM et ceux de Charles Perrault ? Pourtant, les personnages et la thématique des récits sont identiques en passant de l’un à l’autre et Bruno Bettleheim a montré que leur vérité ne se situe pas au plan du récit [3]. On comprend donc que ces sites se basent sur un archétype de croyant tout à fait illusoire, l’homme de paille construit aux fins qu’il soit plus facile à abattre. Surtout, on comprend dès cette observation que les auteurs ne se sont pas renseignés sur la recherche actuelle sur la composition de la Bible non plus que sur la composition des évangiles. Rappelons que les découvertes de Qumran Scrolls, Manoscritti di Qumran, manoscritti del Mar Morto [en italien]. Ces rouleaux ont montré que chacun des livres actuellement réunis sous une même couverture furent d’abord des rouleaux de récits séparés, connaissant des rédactions diverses. Le Canon, qui les réunit dans un même livre afin de donner une autorité à certains d’entre eux, est une invention tardive.

La recherche est-elle uniquement théologique ?

Les sites athées vont même jusqu’à propager l’idée que la critique des textes bibliques ne serait pas faîte, comme le montre cette citation tirée d’une page du Cercle Zététique :

Le CZ revendique le droit du public à une histoire démythifiée des religions, établie selon les critères habituels en usage en histoire. Il estime qu’il est dommageable que l’étude des origines chrétiennes reste un domaine réservé, dans lequel textes et documents échappent à une méthode critique de routine.

Cette critique est faite depuis plus de 100 ans. Le seul problème est la diffusion des travaux auprès du grand public, au moins dans les pays latins d’Europe, au contraire des pays anglo-saxons. Cela est sans doute dû à l’impact de la Crise Moderniste dans les pays à majorité catholique.

La recherche exégétique est-elle uniquement le fait de chercheurs confessionnels ? Voici un échantillons des lieux universitaires, donc laïques, où se pratique ce type de recherche. Comme l’explique Claude Langlois, dans son article “Aux origines des sciences religieuses en France : la laïcisation du savoir (1810-1886)”, cette recherche a échappé aux personnels ecclésiastiques depuis Ferdinand Buisson.

Aux USA, la recherche se fait dans les Divinity Schools ; le personnel est donc fréquemment confessionnel. Le pluralisme confessionnel organise un contrôle mutuel et le dialogue entre eux. On trouve même une école juive du nouveau testament. Seuls les fondamentalistes ne participent pas (de leur fait), ou dans des institutions qui leur sont propres, c’est à dire sans accepter de confronter leurs travaux à ceux de leurs pairs.

Voici quelques institutions 100% laïques et 100% d’état qui étudient ces sujets :

Tout se passe donc comme si la documentation des sites athées et mythistes n’avait pas été mise à jour depuis le milieu du 19ème siècle

L’effacement des sources

Le gros problème est que ces sites athées se recopient les uns les autres et, de ce fait, accumulent les erreurs :

  • erreur de méthode :tous proposent des lectrures de la Bible en langue vernaculaire. Aucun n’a l’idée de proposer des lectures en langue d’origine, comme on en trouve dans Encyclopedia of New Testament Textual Criticism [en] ou le Journal of Hebrew scripture
  • Aucune prise en compte du contexte historique, non plus que de l’évolution de la science hisorique qui ne naît qu’au 19ème siècle.

Dès qu’on sait ce qu’est l’histoire et même l’épistémologie de l’histoire, voire un peu d’histoire des littératures anciennes, on sait que ces sites sont “de gros mensonges”, ou plus exactement, des site parfaitement incultes. Ils n’ont jamais entendu parler des diverses théories de composition de la Bible

Bien entendu, ces remarques n’ont pas l’objectif de prouver que la Bible est un livre d’histoire au sens où Georges Duby, ou Pierre Vidal Naquet faisaient de l’histoire.

Des sources en vase clos

La liste des la liste de soit-disant historiens présentés et répétés d’un site à l’autre, n’ont laissé aucun souvenir dans la profession. Même le professeur Alfaric, si prisé des sites mythistes, n’a jamais publié ses théories sur Jésus dans des revues de premiers rangs auxquelles sa position lui donnait accès. On ne trouve donc aucune théorie mythiste signée Alfaric dans

  • La revue d’histoire des Religions, fondée par Louis Guimet
  • non plus que dans la Revue d’Histoire fondée par Gabriel Monod

Ces théories ne sont publiées que “dans des bulletins paroissiaux” comme les Cahiers de l’Union Rationalistes ou le Bulletin de l’Association Ernest Renan, malgré les liens professionnels et amicaux que le professeur entretenait avec Alfred Loisy ou Charles Guignebert qui dominaient la discipline à l’époque, le premier au Collège de France et le second à la Sorbonne.

On donne à Renan une postérité douteuse ; Renan, Loisy, Turmel, Guignebert, ne furent jamais des tenants de la thèse mythiste. On donne à croire que leurs travaux préparèrent le terrain à Couchoud (médecin, Poète érudit, japonisant et helléniste, bref, rien qui le destine à l’histoire), ProsperALFARIC, MOUTIER-ROUSSET, STEPHANE, LAS VERGNAS, ORY, FAU et quelques autres,en Russie, LENZMAN et dans les pays anglo-saxons , on met en avant G.A. WELLS dont le « Did Jesus exist ? » est paru vers 1986.

Un curieux manque d’esprit critique les empêche de voir que ces auteurs ne sont pas reconnus dans le milieu universitaire ; quelques uns, alerté, parlent de complot “de l’Eglise” et “censure de la critique”, c’est à dire qu’on invoque la théorie du complot.

Le mythisme remonte plus loin que cela comme le montre tour d’horizon du mythisme [4] qui montre que la première thèse mythiste remonte à 1830.

Des ressources encyclopédiques et académiques

Plutôt que de fréquenter des sites qui disent n’importe quoi sous couvert de rationnalisme, voir plutôt pour les débutants :

et pour les plus avancés qui veulent en savoir plus sur la fabrication du nouveau testament (c’est en anglais) :

  • Synoptic Problem Website qui propose un panorama de plus de 1000 théories viables d ela généalogie des évangiles,
  • New Testament Stemmatics qui expose l’une des méthodologies de la critique textuelle, et par là même répond aux questions de “contradictions”
  • critique radicale qui expose l’une des méthodologies de la critique textuelle, et par là même répond aux questions de “contradictions”

Enfin, pour ceux qui veulent vraiment tomber de leur arbre en considérant ce que des auteurs le plus souvent chrétiens disent eux-même de leurs écritures (C’est en anglais)

  • Journal of Higher Criticism qui expose les points de vue les plus avancés en matière de critique radicale biblique. Cette revue existe depuis 1994 en ligne mais les auteurs qui fondèrent le higher criticism publièrent vers 1850 (mille huit cent cinquante)

Conclusion

On ne peut rien fonder de sérieux sur des sites de propagande…. si votre propos consiste bien à vous informer sur la critique biblique, vous devrez apprendre à choisir vos ouvrages et ne pas vous contenter de publications remplies d’à peu près et d’approximations. Ces sites se révèlent, au bout de l’étude, des sites de propagande anti-religieuse. Outre les articles présentés ci-dessus, qui sont des bases de départ, le blogroll du Pharisien Libéré propose quelques sites d’initiation

notes

  1. ↑1 qui prétend mettre en relief les “contradictions de la Bible” par un plan de lectures associant Ancien et Nouveau Testament
  2. ↑2 qui considère qu’on en sait assez sur le Christianisme quand on a lu “la Résistance au Christianisme” de Raoul Vaneigheim
  3. ↑3 Psychanalyse des contes de fées
  4. ↑4 dont le plus gros est dû à Benoit Monfort, collaborateur du Pharisien Libéré

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