Archive pour la catégorie 'affaires courantes'

Les bons samaritains

Lundi 19 octobre 2009

Cher Nicolas,

Lors de ta magnifique prestation à la première réunion du Conseil français du culte musulman, tu as déclaré être catholique. Cela m’a bien plu. Je me suis dit “Chouette, voilà un type avec lequel j’ai quelques valeurs communes” enfin à quelques détails prêts.

Sûrement, quand t’étais petit on t’as raconté une parabole qui commence comme cela :

“un homme descendait de Jérusalem à Jéricho…”

La suite de l’histoire est assez terrible : il est dépouillé par des brigands et laissé pour mort au bord de la route. 3 personnes passent. les deux premiers sont des huiles de la République qui passent sans s’arrêter et le dernier un quidam qui lui vient en aide au malheureux, le panse et paye son hébergement dans une auberge en précisant qu’à son retour il paiera les frais excédentaires.

Or, je ne me souvenais pas, qu’à la fin, le quidam était traîné devant le Sanhédrin et enfermé au centre de rétention de Coquelles pour délit de solidarité comme l’ont été récemment Charles Frammezelle et Jean-Claude Lenoir. Je te dis cela parce que tu es ministre de l’intérieur et des cultes. Je constate avec regret que les différences entre nos instructions religieuses sont bien plus profondes que je ne l’imaginais et ne se situent pas où tout le monde me le disait. Encore que, les petits gars se réclament eux aussi du catholicisme ???? Cela ne serait pas être le même ????

Bien entendu, je n’imagine pas que tu ailles toquer à la porte de ton collègue Garde des Sceaux pour lui demander de faire quelque chose. Tout de même, tout de même ?? Avant d’aller devant le juge, ils ont bien dû passer par tes services. Je me souviens avec émotion de ce juge qui avait relaxé une femme accusée de vol proclamant “l’état de nécessité” parce qu’elle s’en prenait exclusivement au rumsteack pour nourrir ses enfants.

Notre fière devise de la République Laïque proclame “Liberté, Egalité, Frater… “. Je ne vois plus bien la fin du mot qui s’efface, avec le temps du fronton de nos mairies. Déjà, sur “Egalité“, il y a des banlieues où l’on a bien des difficultés à le mettre en pratique, comme s’il était déjà effacé.

Il me semble que le jugement de Jean-Claude Lenoir et Charles Framezelle donne comme un coup de burin supplémentaire au troisième mot de la devise.Si les deux derniers continuent de s’effacer, je ne vois pas bien ce qu’il restera du premier.

“Donnez-nous aujourd’hui notre pain de ce jour”

En attendant, je requiers l’honneur d’être comptée au nombre de ceux qui soutiennent l’accueil des étrangers en situation irrégulière. Je déclare être l’un d’eux. Je déclare avoir aidé des étrangers en situation irrégulière. Je déclare avoir la ferme volonté de continuer à le faire en mon âme et conscience.

De même que je réclame un changement radical des politiques à l’égard des immigrés et des étrangers, je réclame le droit à la solidarité, contre la logique des États.

Si la solidarité est un délit, je demande à être poursuivie pour ce délit.

Cordialement,

Mulot

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Le voile, le niqab et la bruka ne sont ils que des “tenues vestimentaires” ?

Lundi 19 octobre 2009

Avec les séances de la commission parlementaire sur la burka, http://www.lexpress.fr/actualite/societe/faut-il-interdire-la-burqa_768412.html, Des groupes arabo-musulmans demandent si “c’est bien le rôle d’un gouvernement de s’occuper de détails vestimentaires” et d’embrayer sur la critique d’une “pseudo-laïcité” et sur les lamentations sur l’entrave aux droits de l’homme que représenterait une législation sur ce thème. Si les questions de Burka , de voile ou de niqab n’étaient qu’une affaire de “tenue vestimentaire“, on ne verrait pas ces musulmans et eux seuls monter aux créneaux pour défendre ces accessoires de mode. Si l’on peut mettre une femme pour tenir ce discours, c’est encore plus chic ; certaines, souvent des converties, parlent de “haine du voile” de la part des “occidentaux” là où une réelle analyse devrait trouver une expression plus exacte comme “interrogation sur le voile et sur la ségrégation visuelle des femmes dans l’espace public” .

On peut donc dire que l’allégation “tenue vestimentaire” est un euphémisme destiné à banaliser et camoufler une préoccupation politique : marquer les femmes musulmanes dans l’espace public et montrer, par là, les limites d’un territoire virtuel quoique communautaire . Or, ce territoire n’est pas anodin : il s’agit de celui de l’islamisme, c’est à dire du fondamentalisme musulman.

Le voile est-il un signe religieux obligatoire ?

Au moment de la commission sur le voile, les jeunes filles voilées le serinaient aux autres jeunes issues de familles venues du Maghreb en sorte de les convertir au port de cet accessoire de mode. Pourtant, celui-ci n’est pas une obligation au même titre que les 5 piliers comme ces groupes, issus du tabligh ou du néo-salafisme, tentent de le faire croire.

Dans leur préface (page 18) à “Penser le CoranMahmoud Hussein [1], racontent l’origine de celui-ci de la façon suivante :

“Cela se passait à Médine. Les femmes devaient sortir de la ville, à la tombée de la nuit, pour leurs besoins. Elles étaient alors souvent importunées par des voyous. Elles firent part de leur colère à leurs maris, qui en parlèrent à leur tout au Prophète. C’est à la suite de ces incidents que le verset coranique aurait été révélé à ce dernier (verset XXXII, 59). En revêtant un châle, les femmes libres pouvaient se faire reconnaître même dans l’obscurité de la nuit”

Ils ajoutent l’effet produit par ce récit sur leur auditoire lors de la conférence sur leur précédent livre [2] :

“La jeune femme devant nous était visiblement excédée. Elle finit par nous demander comment nous osions penser que Dieu, dont le Livre ne contenait que des commandements éternels, pouvait n’avoir ordonné le port du châle que pour des raisons aussi triviales
Nous lui répondîmes que cet épisode était cité par les exégètes les plus orthodoxes, et qu’en tout état de cause, elle était libre de considérer que ce verset obligeait toutes les femmes du monde, jusqu’à la fin des temps, ou, au contraire, de considérer qu’il répondait à des exigences étroitement conjoncturelles, aujourd’hui dépassées.”

D’autre part, Leila Babès rappellent combien le voile est pratique contraire à l’égalité des sexes :

“Un discours totalement inédit dans l’histoire de l’islam se propage depuis quelques années en France, selon lequel le voile est une prescription et une pratique religieuses ! Il s’agit là d’une des plus grandes mystifications que des musulmans aient jamais produites sur leur propre religion. Car le voile n’est pas une prescription religieuse et encore moins une pratique religieuse ».

Leïla Babès Le voile est avant tout une affaire d’hommes désireux de se protéger de la femme, comme objet de désir permanent. Dans le pays de la liberté, des musulmans s’indignent qu’avec la loi d’interdiction des signes religieux ostensibles à l’école, on touche à l’honneur de leur communauté, à l’emploi, et à la liberté de la femme. Mais on ne les voit pas manifester contre les atteintes aux Droits de l’Homme dans les pays musulmans. En réalité, la vraie discrimination est celle qui touche aux rapports hommes/femmes. Et en matière des droits de l’Homme ce n’est pas la liberté religieuse qui est menacée, mais bien l’égalité des sexes ” http://www.editions-bayard.com/pages/fiche.php?isbn=2227474416

Rappelons que l’imposition du voile aux femmes musulmanes ne date que de la révolution théocratique iranienne ; auparavant, les mêmes femmes musulmanes n’avaient qu’une seule idée : s’en débarrasser et ceci, depuis les indépendances. On ne saurait donc parler “d’entrave à laliberté de culte” mais “d’extension du domaine de la lutte communautaire” dont les femmes et les gays font les frais.
On ne peut même pas parler de “tradition” car dans de nombreux pays du Maghreb,

  • soit il n’était pas porté sans qu’on puisse parler d’influence du colonisateur : des photos anthropologiques d’époque en témoignent
  • *soit il était porté selon un pliage régional qui n’avait rien à voir avec l’uniforme actuel mondialisé, imité soit de la pratique en l’arabie saoudite, soit de la pratique iranienne, soit, depuis peu, de la mode afghane depuis le régime taliban. Il suffit de voir des films afghan sous le règne du dernier roi afghan pour voir combien ledit accessoire de mode était absent du paysage.

Ce voile n’est donc pas une pratique religieuse mais un marqueur d’une volonté théocratico-politique.

Les femmes ne sont pas la propriété de l’une ou l’autre des communautés ; elles sont aussi des citoyennes et c’est cela que l’enquête parlementaire défend. En quelque sorte, la revendication que l’enquête parlementaire s’immiscerait dans la vie des gens contre les droits de l’homme se révèle “pseudo-droit de l’hommiste” en ce sens qu’elle oppose les droits de l’homme à ceux de la femme. Il est donc abusif de parler d’inquisition ou de pseudo-laïcité dans ce cas. Il s’agit bien d’une réplique à l’inquisition (la hisba ou police des moeurs) quand elle veut restreindre les droits de l’homme.

Ensuite l’allégation toute musulmane que tout ce qui entrave le marquage communautaire des femmes atteint les droits de l’homme ou la laïcité provient d’une profonde méconnaissance de ladite laïcité comme de son histoire.

Voici les termes dans lequels s’exprimait son esprit en 1903 dans une proposition de loi sur la police des cultes :

“La liberté de conscience et de croyance et le libre exercice des cultes sont garantis à tous les citoyens français, sous la seule restriction ci-après relatives à la police des cultes.”[3]

et la version consolidée 2009 de la loi de 1905

De même que l’intransigeance de l’église catholique romaine a conduit en 1904 et 1905 à toute une série de mesures à son encontre jusqu’à ce qu’elle rentre dans le rang laïc, il n’est pas impossible d’envisager dans le cadre de la police des cultes, les mesures nécessaires à faire rentrer le fondamentalisme musulman dans le cadre de la laïcité en sorte qu’il devienne conforme non seulement aux droits de l’homme mais aussi de la femme.

notes

  1. ÎBaghgat Elnadi (né en 1936) et Adel Rifaat (né en 1938), 2 politologues égyptiens avaient présenté une synthèse de la Sirâ
  2. Î Al-Sira
  3. Î projet de loi de 1903 sur la spération des églises et de l’état et la police des cultes

En savoir plus

  • ZARKA Yves-Charles (dir.), Faut-il réviser la loi de 1905 ? La séparation entre religions et État en question, Paris, PUF, « Intervention philosophique », 2005,
  • Ce que Leila Babès a dit à la commission.
  • Leila Babès, le voile démystifié
  • Curieusement, Oumma ne retient d’elle que l’article dans lequel elle critique l’attitude des professeurs vis à vis des élèves voilées et affirme que la laïcité s’applique au service public et ne dit pas un mot des autres interventions, par exemple, celles où elle dit que le voile est “l’étoile jaune de la condition féminine“. On avait déjà vu un phénomène de semblable sélection avec Olivier Roy dont on retenait l’article sur la critique de l’islam qui parfois s’apparente à du racisme mais dont le livre “La Sainte ignorance : le temps des religions sans culture” dans lequel il traite largement du néo-salafisme est cérrément ommis.

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Litteraliste = vrai croyant ?

Mardi 13 octobre 2009

L’un des sports favoris des Q/RIstes athées consiste à interroger le chrétien sur les “contradictions de la Bible“. Si l’on construit des réponses circonstanciées, par exemple via l’histoire des textes ou les genres littéraires, on obtient facilement ce type de réponse :

“En même temps ne plus prendre les textes au pied de la lettre est-ce vraiment encore être de cette religion?”

C’est l’argument de Jean Bricmont (qui en est resté au concordisme)selon lequel tout croyant qui réfléchit à sa religion et pour cela acquiert une certaine culture, ne serait pas “sincère“.

  • D’une part, cela signifie que ce type d’athée choisit son adversaire : le croyant littéraliste. Le fait est qu’il est plus facile à déstabiliser que le “fidèle“, c’est à dire le celui qui adhère à une religion autrement que les yeux fermés.
  • D’autre part, cela signifie que l’athée qui fait cette remarque, “que celui qui n’est pas littéraliste n’est pas sincère” ou “pas croyant“, reconnaît comme orthodoxie de n’importe quellle religion, le courant fondamentaliste. Ce qui en dit long sur la culture en matière de “fait religieux” de l’athée en question !

En quelque sorte, n’ayant rien à répondre, il préfère classer ces “croyants non littéralistes” en hérétiques, voire en apostats.

1- Envisager des questions religieuses sous l’angle de la théologie, voire de la théologie comparée, nécessite une culture

dont l’athée modèle Bricmont ne dispose pas ; en outre cela nécessite de disposer des outils des sciences humaines, ce que Bricmont et ses adeptes refusent d’entrée de jeu.

Dans une émission “science culture” sur France-Culture, il a admis que son pamphlet écrit avec avec Sokal (1997), qui lui a donné la célébrité (bien plus que les travaux de physique théorique qui lui permettent de professer à Louvain) , avait surtout pour objectif de montrer que les sciences humaines n’étaient pas des sciences.

Le fait est qu’on aurait pu retourner cette critique concernant l’usage du vocabulaire des sciences dures par les gens de sciences de humaines aux gens des sciences dures quand ils utilisent le vocabulaire des sciences humaines, voire de la théologie. Ainsi, quand les mathématiciens parlent de “mathématiques transcendentales“, de quoi nous parlent-ils ? Et quand on parle de vocabulaire abscons, je conseille à quiconque veut en tâter d’écouter les conférences de mathématiques ou de biologie du Collège de France qui sont podcastables !

Les scientifiques concernés répondent que le problème vient du manque de bases de l’auditeur (et donc de l’apprenti défaillant et la difficulté n’est pas du côté du scientifique, cela va de soi) ; ce qui ne tient pas bien la route quand on écoute des choses aussi spécialisées que les conférences de Anne Cheng sur les philosophies chinoises qui sont immédiatement compréhensibles pour un auditeur de niveau bac (à savoir 80% d’une classe d’âge, n’est-il pas ?), en dépit des citations en chinois.

On peut donc conclure que la volonté de préserver un pré carré “sélectif” conduit les “scientifiques” des sciences dures à ne pas prendre le temps de préparation pédagogique pour rendre leur objet communicable [1 Stella Baruch].

Il en résulte que, l’athée préférant débattre (et gagner facilement)

contre le croyant littéraliste mais se trouvant dans l’impossibilité de gagner devant l’autre, le fidèle, préfère le classer comme “hérétique” voire en “apostat” (le vocabulaire de celui qui revendique l’orthodoxie) plutôt que de trouver un autre mot que celui désignant celui qu’il tient pour un débile définitif” : le “croyant”

Il pratique alors un dénigrement par le jugement moral plutôt que par l’argumentation rationnelle, juste parce que le fidèle le met dans une situation où, ne pouvant gagner dans le combat prosélyte, son image de lui en tant que “maître de la Raison, de la logique et de la libre culture ” en prend un “sacré” coup !

En cela, il utilise “l’ultime stratagème” décrit par Schopenhauer, l’insulte, dans la manière du “croyant“, celui-là même qu’il dénigre usuellement, en posant sa vérité : le fidèle est un apostat . Il épouse en cette occasion le point de vue du débile d’hier.

Le problème est donc bien le prosélytisme

in vivo

A l’appui de la  déclaration qui me sert de point de départ, un Q/Riste m’écrit la chose suivante (en substance) :

“*sur son site l’église catholique écrit que Genèse 1 est un mythe symbolique
*sur les sites athées, les athées écrivent que la Bible est un mensonge
*l’église catholique est donc un site athée”

Cette déclaration tombe exactement dans la trappe décrite dans mon exposé ci-dessus. En effet, ce raisonnement nous montre deux choses :

  •  l’auteur de ce syllogisme ne maîtrise pas les règles du syllogisme juste. En effet, le raisonnement syllogistique obéit à des règles précises que celui-ci ne respecte pas. Il est donc faux sur le plan méthodologique et sa conclusion en souffre.
  • en dépit de cette erreur de méthode (qui fait tomber le dogme que l’athée est le maître de la raison raisonnante), le syllogisme porposé nous informe que l’auteur du syllogisme procède à l’équivalence entre “mythe” et “mensonge

Dans ce cas, c’est le manque de connaissances en littérature. L’auteur du syllogisme ne connaît que le sens commun du mot “mythe” et ignore le sens littéraire du même mot, ce qui l’empêche de comprendre la phrase issue du site de l’église catholique. Et pourtant, l’ECAR avait pris la précaution de pratiquer la redondance en ajoutant l’adjectif “symbolique“.

Pour notre militant de l’alternative “littéralisme v/ apostasie“, le mythe, le symbole sont synonymes de “mensonge“. On peut penser qu’il aura autant de difficulté à comprendre des genres littéraires voisins comme “midrash“, “parabole“, “fable“.

On comprend donc que l’alternative en question ne tient la route qu’à la condition d’avoir des lacunes en philosophie et en littérature. Nous sommes donc dans un cas exemplaire de mon exposé ci-dessus.

en savoir plus

  • John Hick, God has many names. En fin d’ouvrage, l’auteur explique que le savoir sur les religions est en vente libre.
  •  Pour comprendre la différence entre “mythe” et “mensonge“, voir Jean-Pierre Vernant, mythe et pensée chez les grecs, 1965.  Pour les essentialistes, rappelons que Jean-Pierre Vernant éminent historien et philosophe était athée ; ce n’est donc pas une explication ad usum delphini, mais une explication universitaire donc “scientifique”
  •  Echec et maths, Stella Baruk, Seuil/Points

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Un pit bull avec du rouge à Lèvres

Vendredi 5 septembre 2008

Caroline Fourest donnait, ce matin sur France-Culture, un portrait de Sarah Palin. Elle y signalait sa participation à des commandos anti-IVG, à la National Rifle, sign,alait qu’à elle seule, la vice-candidate républicaine est une menace pour la survie de l’ours blanc. Elle remarquait aussi qu’elle était convertie au protestantisme évangélicaliste et qu’elle avait été membre de Feminist for life (une organisation anti-féministe en fait) et d’une autre organisation réclamant le retour de la suprématie masculine.

D’ordinaire, Caroline Fourest met ses chroniques sur France Culture dans son blog. Mais, pour le moment, cette chronique n’y est pas encore. J’espère qu’elle ne va pas la mettre sur Daily Motion qui présente des difficultés techniques de consultation pour les gens dont le poste n’est pas standard (ne prend pas le flash, le javascript et toutes ces choses)

En attendant, pendant 1 semaine, on peut télécharger la chronique sur France-Culture pour l’écouter et on ne perd pas son temps.

A ce propos, France Culture a changé son site et abandonné son ridicule menu en Flash pour un menu en HTML, bien plus pratique. Les programmes et les téléchargements sont aussi plus amicaux pour l’utilisateur quoique les cadres soient toujours à l’honneur. La recherche est toujours aussi peu pertinente. Il est dommage qu’une chaîne de radio d’une telle qualité continue d’avoir un web qui la dessert.

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La laïcité “à la française” aurait-elle un coup dans l’aile ?

Vendredi 15 fvrier 2008

Dans son discours au CRIF, Nicolas Sarkozy exprime quelques remords sur ses déclarations quant à la morale religieuse et la morale laïque :

“Jamais je n’ai dit que la morale laïque était inférieure à la morale religieuse. “Ma conviction est qu’elles sont complémentaires et que, quand il est difficile de discerner le bien et le mal, ce qui somme toute n’est pas si fréquent, il est bon de s’inspirer de l’une comme de l’autre. “

Nous sommes quelques uns à ne pas l’avoir compris comme cela et à maintenir nos positions.

Nicolas Sarkozy est allé prendre possession de son titre de chanoine honoraire du Latran, titre attaché à la fonction de Président de la République Française. La visite au Vatican est une tradition remise au goût du jour depuis la visite de René Coty en 1957. Elle fut impensable entre 1905 et 1957comme entre 1692 et le premier Empire, entre autres pour un motif voisin de celui invoqué par le Gallicanisme. Certains rois de France se firent couronner en Italie, pour acquérir une légitimité, jusqu’à l’époque où les juristes du roi de France conçurent que le roi n’a pas de supérieur : il ne pouvait donc plier le genoux devant le pape. Cette coutume de l’agenouillement fut en vigueur jusqu’à Pie XII.

Cette démarche est-elle utile à la nation ?

L’essentiel est que Le président de la République soit sur la photo avec Benoît 16. Toutefois, la Curie a peu apprécié le cumul, dans la même journée, de la visite au Vatican et de celle à Romano Prodi, chef du gouvernement italien, pour parler de l’Union Méditerranéenne. Jaloux de sa souveraineté, Le Vatican entend bénéficier du même traitement que les autres états souverains, a fortiori de l’Italie. Sarkozy a vu le pape en coup de vent mais la cérémonie s’est déroulée devant un parterre de cardinaux, d’ambassadeurs, de séminaristes et quelques membres de la colonie française.

Cela nous renvoie à Napoléon 1er et à la visite de Pie VII pendant 4 mois pour régler le Concordat. Le pape sortait de ses états pour la première fois en 1804 1805. Son objectif consistait à re-catholiciser la France. préparer le concordat, couronner Bonaparte. Il ajouta aussi qu’il ne fallait pas travailler le dimanche et demanda qu’on rendit le panthéon au culte.

Pour Napoléon comme pour Sarkozy, il s’agit de manifester que le pape est un souverain, un chef d’Etat ; Sarkozy se range dans la lignée des Napoléon Bonaparte, Charles de Gaulle et François Miterrand qui ont fait la visite de Rome.

Nicolas Sarkozy solennise au maximum sont titre honoraire pour imprimer un cours nouveau aux relations entre l’Eglise Catholique Romaine et la République, entre la France et le Vatican. Le choix du lieu n’est pas un hasard ; la basilique du Latran est celle où furent signés les “accords du Latran” en 1929 les accords de réconciliation entre l’Italie, sous Mussolini, et le saint siège, lors de la création du micro-état.

L’allocution dans la basilique aurait pu être faite depuis l’Elysée. La demie heure de discours après la cérémonie religieuse dans la basilique renoue donc la grande “tradition chrétienne” de la France.

D’ordinaire, les présidents vont voir le pape uniquement dans le cadre d’un protocole sans puissance ni symbole. Sarkozy choisit, au contraire, d’y dire quelque chose, là où Chirac avait fait 15 lignes en 1996. C’est un discours programme où les commentateurs ont relevé. “Laïcité positive” et les “racines chrétiennes de la France” qu’il faudrait “valoriser tout en défendant la laïcité parvenue à maturité” .La Croix se réjouit et l’Humanité méprise. On entend des thématiques empruntées à Napoléon et à Jean-Paul II dans ce discours. Il semble qu’il faudrait mettre fin à une époque de conflits, faire référence aux racines chrétiennes qu’il serait dangereux “d’arracher la racine perdre le sens“, c’est du Jean-Paul II. Il évoque Lustiger donc une tendance dure. La presse française en a peu fait état.

Où est la bifurcation ?

En quoi ce discours manifeste-t-il une rupture dans les rapports entre les puissances temporelles et spirituelles ?. Sarkozy évoque le baptême de Clovis vendu comme “baptême de la France” en 1789. Ces cérémonies n’étaient pas passées sans peine ; quelques uns avaient remarqué la mobilisation des partis royalistes autour d’elles tandis que les laïques avaient signalés qu’elles pouvaient signifier la tendance de fond anti- révolutionnaire de l’Eglise Catholique, l’année même de la célébration du Bicentenaire. Parlant “des souffrances infligées aux prêtres et religieuses“, il se repend de la loi 1905, disant que son interprétation pacifiste est une reconstruction. Il décrit l’engagement des catholiques dans la grande guerre comme le signal de la réintégration des catholiques dans la société politique française et la fin de l’anti-cléricalisme.

Nicolas Sarkozy éprouve le besoin de faire à Rome cette allocution ce qui correspond à s’agenouiller devant le pape l”‘église où elle se passe étant très marquée par l’ultramontanisme. On peut éprouver de la surprise de la relecture de l’histoire où son texte épouse les thèses de l’institut catholique quand il insiste sur le rôle de la première guerre mondiale en omettant qu’il s’agit d’un moment de grave tension entre le Vatican et l’église de France. Mais il comprend que Benoît XVI se veut le successeur de Benoît XV.

la troisième république et le catholicisme

La position des catholiques autour de la période de la mise en place de la loi de Séparation est bien plus ambivalente :

  • Jusqu’en 1891, les catholiques se demandèrent s’ils voulaient être républicains , en sorte que toute allégation qui voudraient que les catholiques eussent été un moment “hors la loi” relève d’un mouvement de victimisation, assez traditionnel dans les courants conservateurs, voire fondamentalistes du catholicisme ;
  • de 1891 à 1905 ils le furent avec difficulté du fait des positions anticléricales de la république.

Les lois sur les associations laissent entière la liberté des consciences mais se montrent bien plus restrictives sur les manifestations extérieures de la religion..

De même, les compromissions sont nombreuses entre les 2 puissances, la République supposée anti-cléricale et le Vatican. Si la République chasse les congrégations en France, elle protège l’installation de missions catholiques au Levant et dans tous l’ancien empire ottoman. La “gloire de la France” a besoin d’écoles chrétiennes qui formeront les élites en gestation de ces nouveaux pays. Le protectorat des chrétiens du Liban (maronites, donc catholiques) lui est accordé sous Napoléon III et ce protectorat ne lui est pas retiré par le Vatican après la loi de 1905. Le roi de France, ultérieurement les chefs d’état français, sont l’ambassadeur du Vatican auprès de la Sublime Porte, la conscience d’être “la seule vraie religion” empêchant le Vatican de se représenter soi même dans un pays qui se revendique musulman. Les catholiques d’extrême orient, particulièrement de Chine ont aussi protégés par la France. Jules Ferry disait que l’anti-cléricalisme n’était pas un article d’exportation.

La France est accusée en 1914 de mener une politique nationaliste. La condamnation de l’action française, en 1921, autorise aux catholiques un ralliement à la République qui, jusqu’ici, ne s’était pas clairement manifesté.

L’émergence de l’état libanais, la fin des états pontificaux lors de l’unification de l’Italie laissant pendante la question de Rome jusque 1929, ces 3 points compliqueront les relations entre France et Vatican ; on fera intervenir les rois italiens alors que le Vatican se veut indépendant de tout état. Emile Loubet visite Rome en 1904 mais ne va pas au Vatican. Le Vatican émet des protestations et, réciproquement, les anticléricaux français protestent contre celles-ci ; ce sera la goutte d’eau qui fera déborder le vase en faveur de la loi de séparation.

Que va faire le Vatican de ce discours ?

Indubitablement, il trouvera un allié dans ce discours. La diplomatie vaticane va s’appuyer sur ce discours pour compter sur la France comme sur l’Italie et la Pologne pour redonner une identité chrétienne à l’Europe. Le discours répond pleinement , peut-être même au delà de ce que souhaitait la curie, y compris dans la tendance la plus dure du conservatisme italien.

Les mots sont des actes en cette matière. Sarkozy en appelle à ‘”une réflexion morale inspirée de convictions religieuses”. Au contraire des politiques inventeurs de la laïcité, Il ne conçoit pas de morale dépourvu de liens avec la transcendance. On avait déjà su qu’il n’était pas franchement philosophe dans un entretien avec Michel Onfray accordé dan le mensuel Philosophie..

Il reconnaît donc “le service moral des conscience” à l’Eglise catholique. La laïcité demeure une condition de la paix civile mais souligne l’importance du catholicisme en France, avec les mots du Concordat “la religion de la majorité des français” . Il n'’en a pas trop rajouté sur ses propres convictions discret à la radio vaticane : Nicolas Sarkozy se considère comme ” catholique de tradition et de coeur.”

Il dit “racines essentiellement chrétiennes“, “désert spirituel des banlieues” façon d’ouvrir la voie à la “France terre de mission “. Ne se croirait à la création de la “mission de France” quand on voulait “recatholiciser la France”. La république attend donc beaucoup des catholiques.

Sarkozy a offert son livre sur les religions et deux éditions originales de Bernanos : “la joie” et “l’imposture“. Montrait-il l’apport des intellectuels catholiques des années 30 à la culture française ?. Il a regretté le silence des intellectuels chrétiens. Il a beaucoup parlé de l’espérance dans son discours en référence à la dernière encyclique de Benoit XVI

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